Au terme d’une semaine de débats et de quelque 1 000 amendements, le projet de loi « pour une école de la confiance » a été adopté lors d’un vote solennel à l’Assemblée nationale, mardi 19 février 2019.

Dans une période sociale très agitée, les débats autour de l’école se sont faits discrets, les médias se contentant de relever des mesures anecdotiques ne touchant pas aux fondamentaux de l’école.

Ainsi l’obligation d’avoir dans une salle de classe un drapeau français et européen a été largement commentée, de même que l’adoption de l’amendement imposant les termes « parent 1 » et « parent 2 » en lieu et place de « père » et « mère ».

Cette loi habilement présentée – éparpillant les articles sans les lier, jouant avec les amendements, noyant les mesures essentielles parmi les accessoires – ouvre la voie à des transformations profondes du système.

La véritable mesure emblématique de cette loi, (qui ne figurait pas dans le texte du projet de Loi et a été ajoutée quelques jours avant le passage devant les députés par un amendement en commission) est la possibilité de créer des Établissements Publics des Savoirs Fondamentaux (EPSF) : regroupement ou plutôt annexion d’écoles primaires au collège de rattachement avec des conséquences multiples en terme de responsabilités, de redistribution des rôles, de réorganisations, etc…

A cela s’ajoutent :

"-" Le renforcement du droit de réserve des enseignants (article1).
-L’instruction obligatoire à partir de trois ans, qui obligera la collectivité à financer les maternelles privées sans doute au détriment des écoles publiques

"-" Le pré recrutement et la formation des enseignants annoncés comme une mesure sociale mais qui en fait est la création d’un vivier de remplaçants à bas coût et donc de faire des économies et de pallier en partie la crise du recrutement, plus forte que jamais.

"-" La suppression du CNESCO : organisme d’évaluation indépendant, remplacé par une cohorte de 14 personnes dont 10 nommées par le ministre lui-même : on n’est jamais mieux évalué que par soi-même !

"-" L’élargissement des expérimentations pédagogiques qui ouvrent la voie à l’annualisation du temps de travail.

"-" La suppression des ESPE (Ecole Supérieure du Professorat de l’Éducation), remplacées par des INSPE (Instituts Nationaux Supérieur du Professorat de l’Education) avec au passage la nomination des futurs directeurs par le ministre qui aura ainsi la main sur la formation initiale et continue.

N’en jetez plus la coupe est pleine !

L’air de rien, avec cette loi scélérate, tout en répondant à la commande de réaliser dans un futur proche d’énormes économies budgétaires, Jean Michel Blanquer opère une formidable reprise en main du corps enseignant et du système éducatif dans son ensemble.

En prenant de vitesse la profession et en avançant masqué, le ministre a déroulé sa partition sans opposition.

Il ne faudrait cependant pas en déduire trop rapidement que la partie soit terminée : une très grande partie du corps enseignant n’a pas connaissance de cette nouvelle loi ou n’en a pas pris la mesure.

L’apathie générale ne vaut pas consentement, aussi attention au réveil du Mammouth !

Monsieur Blanquer pourrait bien, tôt ou tard déchanter : un comble pour un ministre qui a voulu démarrer son mandat en chanson !