Le 10 octobre 2017, 5,4 millions de fonctionnaires étaient appelés à cesser le travail, par la totalité des Organisations Syndicales représentatives du secteur public.

Un constat et une analyse partagés de la situation des Services publics dans notre pays, ainsi que les perspectives des futures dégradations qui ne font aucun doute, tant pour les personnels que les usagers, ont conduit à l’unité d’action.

La fonction publique considérée comme un poids plutôt qu’un atout dans la compétition économique, doit forcément réduire son volume et ses coûts, ainsi le gouvernement compte imposer une baisse des dépenses publiques de 16 milliards d’euros.

L’objectif d’économie budgétaire, devenu l’unique boussole de la politique publique de l’état, continuera d’impacter et de dégrader le système dans son ensemble : comment d’ailleurs pourrait-il en être autrement en supprimant 120 000 postes dans les cinq ans à venir ?

Ce détournement de la fonction Publique ne date pas d’aujourd’hui, on en mesure d’ailleurs au quotidien les conséquences, dans les départements ruraux comme le notre : en témoignent les fermetures d’écoles, d’agences postales, de trésoreries, l’abandon probable de voies ferroviaires alors qu’elles pourraient être une alternative au « tout voiture ».

Les conséquences se font aussi lourdement sentir pour les agents publics, qui voient non seulement, d’année en année, leur pouvoir d’achat diminuer (dans les années 80 un fonctionnaire de catégorie A en début de carrière gagnait mensuellement l’équivalent de deux SMIC contre 1,25 aujourd’hui) mais également leur condition de travail devenir épouvantables

L’efficience se paie « cash » pour des personnels trop souvent placés dans des situations devenues intenables.

A l’interface de l’Administration et des usagers, les agents publics déjà affectés de ne pouvoir remplir correctement leurs missions, souffrent des incessantes récriminations dont ils font l’objet. La déconsidération, d’où qu’elle vienne, est facteur de souffrance pour des personnels qui vouent leur carrière à l’intérêt général.

Le Ministère de l’éducation n’échappe pas à la conjoncture, même si notre Ministre communique sur une légère augmentation, du budget de l’Education Nationale.

L’enseignement scolaire, mission dite « préservée » n’est doté d’aucun emploi supplémentaire dans le projet de loi de finances 2018.

Les 3880 créations de postes annoncées dans le 1er degré proviennent des recrutements effectués en 2017 et seront financés au détriment des collèges et lycées qui subiront la suppression de 2600 postes d’enseignants et 200 postes d’administratifs.

La priorité du primaire claironné par le ministre aura bien du mal à se concrétiser : le dédoublement des CP en REP « coûtera » à lui seul 3400 postes, la poursuite de l’opération pour le niveau CE1 restera très hypothétique !..

Pour ce qui est du reste de la chaine éducative, il ne faut pas s’attendre à voir le moindre changement : les difficultés liées aux effectifs perdureront (pour mémoire 43000 élèves supplémentaires à la rentrée 2016, 50 000 de plus à cette rentrée et une augmentation certaine pour la rentrée 2018), les remplacements tant dans le primaire que le secondaire seront toujours plus problématiques et nous aurons forcément, davantage besoin de personnels précaires, d’autant que les recrutements sont prévus à la baisse.

Tous ces manques, toutes ces dérives ne sont pas, bien entendu sans conséquences sur la grande majorité de nos élèves et bien sûr ceux, qui ont le plus besoin de notre école républicaine.

N’ayant pas les moyens et les conditions nécessaires aux apprentissages, les difficultés plutôt que de se résoudre, s’amplifient, se reportent et se répercutent, du primaire au collège, du collège au lycée, du lycée à la faculté.

De ces constats, resurgissent opportunément, les débats récurrents sur l’inefficacité de notre système éducatif, son incapacité à réduire l’échec scolaire et réduire les inégalités sociales.

Ainsi, la dernière intervention « à charge » contre l’Education Nationale, par Didier Migaud premier Président de la Cour des comptes, outre qu’elle reprend les habituels poncifs de la pensée libérale, jette un discrédit sur la profession, en mentant volontairement par omission.

Monsieur Migaud avance par exemple, qu’il serait possible de réduire le problème de remplacement des enseignants absents dans le secondaire, en augmentant la mise à disposition des enseignants dans les établissements scolaires.

Il oublie de dire que la DEPP (direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance) a évalué le temps de travail d’un enseignant du second degré à environ 42H.

Monsieur Migaud fait la démonstration de l’inefficacité de l’augmentation des moyens, en faisant le parallèle entre la création des postes sous le quinquennat Hollande et les mauvais résultats du système scolaire français acté par les enquêtes internationales.

Il oublie de dire que les postes créés en questions, ont été utilisés à remettre en place une formation des enseignants sacrifiée sous le quinquennat Sarkozy et « consommés » par la forte augmentation des effectifs du secondaire.

Au-delà de la désinformation déjà inacceptable, qui n’a d’autres buts que de véhiculer l’idée, que les fonctionnaires seraient des privilégiés, Monsieur Migaud trace le sillon de la discorde sociale dans lequel il sème ses contre vérités.

Monsieur le Préfet, Mesdames et Messieurs, comprenez bien que le 10 octobre 2017, les fonctionnaires n’étaient pas dans la rue pour s’accrocher à des privilèges !

Les fonctionnaires étaient dans la rue :

"-" d’abord pour faire savoir, qu’ils étaient excédés par leurs conditions de travail, qui les empêchent de remplir sereinement les missions, pour lesquelles ils ont été recrutés.

"-" Pour avoir une reconnaissance financière à la hauteur de l’investissement qu’ils mettent au quotidien, dans l’intérêt général.

"-" Pour combattre toutes les décisions politiques prises récemment, qui n’ont d’autres buts que d’affaiblir la Fonction Publique et d’ouvrir tous nos secteurs au marché.

Le sens de l’intérêt général fait partie de notre ADN et soyez en certains, même lassés par les attaques incessantes et régulières contre les services publics, nous saurons trouver les ressources, pour défendre notre bien commun.