Monsieur le Préfet, Monsieur le Président, Monsieur l’Inspecteur d’Académie, mesdames et messieurs, parents, élus, membres du CDEN,

Personnels de l’Education nationale, parents et jeunes manifestent partout en France, depuis des semaines, pour dénoncer les 16 000 nouvelles suppressions de postes prévues à la prochaine rentrée alors même que plus de 60 000 élèves supplémentaires sont attendus dans l’ensemble de nos établissements. Ces suppressions conjuguées aux milliers de suppressions de ces dernières années et aux mesures et réformes néfastes imposées de la maternelle au lycée dégraderont encore les conditions d’apprentissage des élèves et celles de travail des personnels. Nous sommes face à une politique à petite visée qui non seulement ne répond pas à une démocratisation nécessaire mais qui en plus redessine un système éducatif de plus en plus inégalitaire laissant sur le bord du chemin les élèves les plus en difficulté ainsi que ceux issus des milieux les plus défavorisés. Notre Ministre trompe l’opinion en affirmant sans cesse, comme si cela pouvait convaincre, que l’on peut faire « plus avec moins ». Pourtant c’est bien la politique gouvernementale qui gâche le capital humain de ce service public, maltraite et démotive les personnels et aggrave les difficultés de l’Éducation Nationale notamment celles pointées par les enquêtes internationales. La France est devenu un des pays qui investit le moins dans son éducation et donc dans l’avenir ! Loin de l’objectif de 80% d’une classe d’âge au baccalauréat et de 50% au moins de diplômés de l’enseignement supérieur, la politique éducative actuelle ainsi que les moyens consentis par ce gouvernement visent un recentrage sur une scolarité obligatoire limitée à 16 ans avec des exigences au rabais, pour un nombre d’élèves toujours plus grand. Pourtant, les défis à relever pour assurer une société de la connaissance, une société démocratique, une société faisant une large place à la recherche, et il nous semble que nous en avons grand besoin actuellement, imposent de repenser des contenus d’enseignement riches, véritable culture commune, tout en menant une réflexion sur les pratiques d’enseignement ainsi que sur les conditions de scolarisation des élèves. 25 élèves par classe maximum dès la maternelle, mise en œuvre de dispositifs d’aide et de soutien aux élèves, possibilité de travail en petits groupes d’élèves, de dédoubler les classes dans certaines disciplines, temps donné aux personnels pour qu’ils puissent travailler ensemble, mise en place d’une réelle formation des enseignants….autant de chantiers qu’un grand pays riche et démocratique comme la France devrait ouvrir d’urgence ! Pourtant c’est tout le contraire qui se produit !!!

Moins d’Etat, moins de service public, moins de fonction publique, moins d’école publique, c’est le socle commun de la politique gouvernementale. A peine les isoloirs disparus des mairies et des écoles, les Inspecteurs d’académie ont engagé la préparation de la rentrée 2011 pour le primaire. Dans les départements, c’est une litanie de suppressions de postes d’enseignants qui est actuellement énoncée, et partout nous retrouvons le même modèle, à croire que le ministère a édité à l’attention des recteurs et des IA un petit livre retraçant les mille et une méthode pour supprimer des postes : relèvement des taux pour obtenir une ouverture afin d’accompagner la hausse continue du nombre d’élèves par classe, mais abaissement de ce même taux pour fermer… suppression de postes RASED vacants ou occupés par des non spécialisés … réduction du nombre de remplaçants… recours à des fusions d’écoles … suppression de postes d’enseignants en Education prioritaire ou dans les écoles recevant des élèves de milieux fragiles ou défavorisés… Notre département n’échappe évidement pas à ce canevas que l’on retrouve trait pour trait !!!

Nous vous ferons grâce de la lecture complète de la lettre envoyée par le syndicat des Inspecteurs affilié à la FSU en direction des IA, qui est pourtant édifiante de l’état d’esprit qui règne dans notre ministère, mais nous en citerons tout de même un passage qui résume parfaitement la situation :

« Cependant, nous n’avons pas l’intention, dans les discours que nous tiendrons auprès des équipes enseignantes, des parents d’élèves ou des élus de tenter de leur faire croire que ces mesures puissent être justifiées par d’autres motifs que ceux d’un choix politique de réduction budgétaire.
Nous ne justifierons pas par des raisons pédagogiques la diminution des postes en RASED dont nous savons qu’ils contribuent à l’aide aux élèves en difficulté.
Nous ne justifierons pas, au prétexte de la difficulté de faire apparaître des plus-values spécifiques, la diminution des postes supplémentaires en zone d’éducation prioritaire car nous savons qu’ils contribuent à la lutte contre l’illettrisme.
Nous ne prendrons pas l’exemple de quelques situations isolées et caricaturales pour prétendre faire la preuve d’un manque d’efficience généralisé.
Nous ne comparerons pas les dotations d’un département avec des moyennes nationales car nous savons que les caractéristiques sociologiques de certains départements justifient des dotations particulières.
Nous ne prendrons pas le prétexte d’études incertaines sur le taux d’encadrement des classes pour faire croire que la preuve scientifique est désormais administrée et que le nombre d’élèves par classe n’a aucune relation avec leur réussite scolaire.
Nous ne relativiserons pas la portée que représente, chaque jour, pour des centaines d’élèves, dans certains départements, le fait que leur enseignant absent ne puisse être remplacé, faute de moyens suffisants… »

Ce courrier parlant de lui même, nous ne pouvons que le reprendre à notre compte pour dénoncer l’ensemble des suppressions de postes dans notre département, ainsi que partout en France, pour nous opposer aux 60 000 prochaines déjà programmées, pour exiger un collectif budgétaire dans les délais les plus brefs afin de rendre les postes à la jeunesse de notre pays et aux enseignants, nos collègues, qui chaque jour, année après année, voient un peu plus leurs conditions de travail et les conditions d’enseignement se dégrader, les laissant pour un nombre toujours grandissant, dans un état de détresse poussant certains d’entre eux à un geste irréparable, poussant les jeunes sans formation à la démission et laissant des matières entières dans une pénurie d’effectifs, les jeunes diplômés préférant s’enfuir vers le privé …
Nous n’accepterons plus les discours habituels sur la dette de la Nation et l’effort que doivent supporter l’ensemble des ministères…
La guerre du pétrole déclenchée en Libye par notre gouvernement et ses alliés va coûter des milliards d’euro à notre pays et lorsque le budget de la défense (31 milliards) sera épuisé, le gouvernement sans vergogne demandera des rallonges budgétaires pharamineuses au parlement… Nous rappellerons au passage qu’une heure de vol du Rafale nous coûte, en dehors des munitions, 40 000 € soit la paye annuelle d’un ou deux fonctionnaires, que l’heure d’utilisation du porte avion Charles de Gaulle, célèbre pour ses avaries, revient à 50 000 € et que lors des 3 premiers jours de l’intervention française ce n’est pas moins de 400 heures de rotation d’avions de chasse qui ont eu lieu… Nous vous laissons faire la somme du nombre de postes d’enseignants qui ont été sacrifiés pour « apporter la Paix et la liberté au Peuple libyen »
Nous ne ferons qu’évoquer « la prime aux suppressions » accordée aux recteurs, et dont la progressivité aura certainement incité le Nôtre à faire une rallonge de 17 postes et demi à la dotation négative du ministère.
A cette heure, notre écœurement atteint son paroxysme et nous vous demandons très solennellement, Mesdames et Messieurs de refuser cette carte scolaire présentée par Monsieur l’Inspecteur d’Académie, tout en saluant le travail, toujours plus difficile, des administratifs de l’Education Nationale qui voient eux aussi, année après année fondre leurs effectifs comme neige au soleil.